[AAC ]Communautés, métropoles et santé

Vers un renouvellement des acteurs et politiques publiques locales en santé ?

Projet scientifique

Programme « POPSU Métropole [1] » – plate-forme orléanaise.

La pandémie de la COVID-19 a souligné l’importance du « local » dans sa gestion, au point d’évoquer, chez certains, l’image du « maire protecteur » comme acteur clef de celle-ci. Plus largement, cette crise rappelle que le bloc communal, communes et intercommunalités, joue un rôle essentiel dans les politiques territoriales de santé[2], aussi bien en termes de solutions aux insuffisances de l’offre de soins[3] – les « déserts médicaux » – que de réponses aux enjeux, plus larges, de qualité de vie des habitants[4].

Pour autant, la santé ne constitue pas une compétence spécifique des communes et intercommunalités ; elle reste avant tout une prérogative de l’État, de son administration déconcentrée et de ses 1,2 millions d’agents de la fonction publique hospitalière. Néanmoins, elle relève aussi d’une « clause générale de compétence » des communes[5] assise sur une longue tradition, municipale et urbaine[6], d’interventions dans des champs d’actions aussi divers que l’environnement, l’équipement, les infrastructures sanitaires, l’urbanisme ou encore l’attractivité des territoires[7], décrivant des trajectoires de compétences plus ou moins singulières. Avec leur « révolution silencieuse » des années 1990, les intercommunalités à fiscalité propre ont conforté ce rôle par leur capacité d’action, de financement et d’ingénierie territoriale. Les communautés occupent ainsi une place de plus en plus importante, tant pour accompagner la décentralisation, se substituer aussi à l’État providence en déclin, ou encore répondre à de nouveaux enjeux sociétaux ou obligations conférées par la loi. Par exemple, à partir de 2016, la mise en œuvre des Plan Climat Air Énergie Territoire (PCAET), rendus obligatoires pour tout EPCI de plus 20 000 habitants, crée de nouveaux champs de l’action publique qui, à travers la qualité de l’air et les politiques environnementales construites à l’échelle de bassins de vie, constitue un domaine d’intervention publique de plus en plus essentiel dans les défis sanitaires. À cette évolution du champ d’intervention de l’échelon local dans les politiques de santé se poursuit par ailleurs une lente transformation des acteurs du bloc communal : ainsi, à partir de 2010, la création des EPCI à fiscalité propre, les « métropoles », marque, pour l’heure, les avancées d’un paysage intercommunal de plus en plus intégré et ambitieux dans ses politiques[8].

Le projet scientifique de ce colloque consiste à interroger la place, le rôle et l’histoire de ces structures intercommunales dans les politiques territoriales de santé[9]. Son ambition est de répondre à la question suivante : par la montée en puissance des intercommunalités à fiscalité propre, dont les métropoles, observe-t-on une évolution sensible des politiques de santé publique construites à l’échelle du bloc communal ? Trois axes d’interrogation guident notre réflexion.

Axes thématiques

  • Le premier axe concerne la nature de leurs fonctions et de leurs actions liées à la santé[10]. La lutte contre les déserts médicaux, avec la multiplication ces dernières années de Maisons de santé pluridisciplinaire (MSP) et de pôles Santé, ou encore la signature des Contrats locaux de santé (CLS), participent de politiques relevant de l’offre de soins et de son adaptation aux besoins[11]. D’autres interventions se dessinent également. Plus qualitatives – mais peut-être tout aussi essentielles dans un futur immédiat –, elles concernent le bien-être des populations[12], la qualité de vie et les réponses à apporter à de nouveaux besoins[13], individuels et collectifs, tant liés aux mutations de nos sociétés, qu’aux défis sanitaires d’environnements géographiques de plus en plus instables, vulnérables et inégalitaires. Là encore, au-delà de la nature de ces actions, quelles sont les spécificités et trajectoires des interventions des intercommunalités à fiscalité propre par rapport à ces politiques territoriales ? Reflètent-elles des différences de nature entre la commune et les intercommunalités, voire entre les différentes catégories de communautés (communauté de communes, communauté d’agglomération, communauté urbaine et métropole) ? Est-ce que, au final, l’action intercommunale se révèle plus efficiente ?
  • Le deuxième axe questionne les effets des intercommunalités dans l’écosystème local de la santé. Le couple que forme la commune et l’EPCI est au cœur de cette interrogation ; mais aussi la relation qui se dessine, tout à la fois, avec les Départements, les Régions et l’État déconcentré, voire d’autres périmètres institutionnels (PETR, par exemple). Comment se construisent et s’organisent ces articulations territoriales qui ne cessent de se conforter, à la fois dans leurs dimensions politiques, juridiques et organisationnelles, mais aussi spatiales. Quelles ont été les phases de ce renforcement ? Concernent-elles, de manière équivalente, l’ensemble des politiques liées à la santé ? Quels sont leurs impacts économiques et financiers ? Quelles sont les évolutions relevées dans leur dimension organisationnelle et gestionnaire ? Plus fondamentalement, est-ce que la communauté traduit, comme dans d’autres domaines, le maintien d’une simple « inter-communalité » au service de la commune, et plus particulièrement au profit du personnel politique communal?[14] Ou alors traduit-elle une montée en gamme des structures territoriales organisées et légitimées à l’échelle de bassins de vie ?
  • Enfin le troisième et dernier axe de ce colloque porte sur le rôle des « métropoles » dans ce champ de l’action publique territoriale. Les « petites dernières » de la révolution intercommunale reflètent-elles une singularité dans le développement des politiques de santé ? Sises sur des agglomérations qui, par leur taille, apparaissent bien dotées en termes d’infrastructures de santé, elles ne semblent pas destinées à jouer a priori un rôle important dans les politiques territoriales de santé. Pour autant, ici et là, on relève l’affirmation de politiques sanitaires portées par les métropoles, confrontées à des situations d’inégalités socio-spatiales fortes au sein de leurs territoires ; ou encore à des enjeux de solidarités à relever vis-à-vis de leurs territoires voisins, moins bien dotés. Compte aussi la nécessité d’adaptation, voire de transition, face à des besoins nouveaux de sociétés métropolitaines qui apparaissent souvent novatrices dans leurs pratiques, leurs besoins et leurs attentes. C’est donc à cet ensemble de questions que nous souhaitons nous atteler : comment les « métropoles à la Française », au-delà de leurs singularités et de leurs diversités de compétences et d’actions, concrétisent – ou pas – une montée en gamme des communautés au sein de l’espace français[15].

Ce colloque s’inscrit dans une démarche interdisciplinaire des sciences sociales qui intéresse les champs du droit, de la géographie, de l’aménagement, de l’économie, de l’histoire, de la sociologie et des sciences politiques et gestionnaires.

Modalités de soumission

Les propositions de communication seront déposées sur le site https://metropolesante.sciencesconf.org/ avant le 17 décembre 2021.

Elles consisteront en l’élaboration d’un résumé de 5 000 signes maximum (espaces compris), mis en forme à partir de la feuille de styles téléchargeable sur le site internet du colloque. Les communications (20 minutes de présentation, suivies de 10 minutes de questions), seront faites en français.

Les modalités d’inscription seront précisées dans la prochaine campagne de diffusion de l’appel à communication. Enfin, les travaux présentés lors du colloque seront valorisés à travers la parution d’un ouvrage scientifique, prévue au premier trimestre 2023. Le processus de sélection et d’édition des articles est programmé entre septembre 2022 et janvier 2023.

Comité d’organisation

  • Pierre Allorant, professeur des universités en histoire du droit, POLEN, Université d’Orléans
  • Sylvain Dournel, ingénieur de recherche en géographie-aménagement, CEDETE, Université d’Orléans
  • Fouad Eddazi, maître de conférences en droit public, CRJ Pothier, Université d’Orléans
  • Franck Guérit, maître de conférences en géographie-aménagement, CEDETE, Université d’Orléans

Comité scientifique

  • Pierre Allorant, professeur des universités en histoire du droit, POLEN, Université d’Orléans
  • Lise Bourdeau-Lepage, professeur des universités en géographie, UMR EVS, Université Jean-Moulin Lyon 3
  • Christophe Demazière, professeur des universités en aménagement-urbanisme, CITERES, Université de Tours
  • Sylvain Dournel, ingénieur de recherche en géographie-aménagement, CEDETE, Université d’Orléans
  • Nathalie Dubost, professeur des universités en sciences de gestion, VALLOREM, Université d’Orléans
  • Fouad Eddazi, maître de conférences en droit public, CRJ Pothier, Université d’Orléans
  • Franck Guérit, maître de conférences en géographie-aménagement, CEDETE, Université d’Orléans
  • Marie-Christine Jaillet, directrice de recherche en sociologie au CNRS, UMR LISST, Université Toulouse-Jean Jaurès, responsable scientifique du programme POPSU Métropoles
  • Laurent Mériade, maître de conférences – HDR en sciences de gestion, Clermont Recherche Management et Chaire Santé et Territoires, Université Clermont Auvergne
  • Marie-Laure Moquet-Anger, professeur en droit public, Université Rennes 1, présidente de l’Association française de droit de la santé
  • Corinne Rochette, professeur des universités en sciences de gestion, Clermont Recherche Management et Chaire Santé et Territoires, Université Clermont Auvergne
  • Guillaume Rousset, maître de conférences – HDR en droit privé, IFROSS, Université Jean-Moulin Lyon 3

Calendrier prévisionnel

  • 1ère diffusion de l’appel à communication :11 octobre 2021
  • 2nde diffusion de l’appel à communication : 10 novembre 2021
  • Date de remise des propositions de communication : 17 décembre 2021
  • Communication des propositions retenues :4 février 2022
  • Communication du préprogramme : 4 mars 2022
  • Communication du programme et ouverture des inscriptions : 31 mars 2022
  • Colloque : 21-22 juin 2022
  • Date de remise des articles : 1er septembre 2022
  • Retour sur les propositions d’article :7 octobre
  • Envoi des articles corrigés : 28 octobre 2022
  • Parution de l’ouvrage : janvier-février 2023
  • Notes

    [1] « POPSU Métropoles » est un programme d’actions partenariales porté par le Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) qui rassemble 15 métropoles autour du thème « la métropole et les autres ». Dans ce cadre, la plate-forme orléanaise, composée de l’Université d’Orléans, d’Orléans Métropole, des 5 communautés de communes et 2 PETR avoisinants ainsi que de l’agence d’urbanisme TOPOS, traite ce thème par le biais des liens entre santé et territoires.

    [2] Honta Marina, Basson Jean-Charles, « La fabrique du gouvernement métropolitain de la santé. L’épreuve de la légitimation politique », Gouvernement et action publique, vol. 6, n° 2, 2017, p. 63-82, URL : https://www.cairn.info/revue-gouvernement-et-action-publique-2017-2-page-63.htm ; Fleuret Sébastien, « Recomposition du paysage sanitaire : quand les exigences territoriales rejoignent les enjeux de santé », Géocarrefour, vol. 78, n° 3, 2003, p. 239-245

    [3] Moquet-Anger Marie-Laure, « Territoires de santé et égalité des citoyens », Revue de droit sanitaire et social – RDSS, numéro hors-série « Territoire et Santé », 2009, p. 116 ; Rousset Guillaume, « La lutte contre les « déserts médicaux » depuis la loi HPST : entre désillusions et espoirs nouveaux », Revue de droit sanitaire et social – RDSS, 2012, p. 1061

    [4] Fleuret Sébastien (dir.), Espace, qualité de vie et bien-être, actes du colloque Espaces, bien-être et qualité de vie, Presses Universitaires d’Angers, SODIS, 318 p.

    [5] Zacharie Clémence, « Le maire et la santé publique », Revue de droit sanitaire et social – RDSS, n° 3, 2021, p. 477-485

    [6] Barles Sabine, La ville délétère. Médecins et ingénieurs dans l’espace urbain : XVIIIe – XIXe siècle. Champs vallon, 1999, 384 p.

    [7] Roué-Le Gall Anne, Le Gall Judith, Potelon Jean-Luc, Cuzin Ysaline, Agir pour un urbanisme favorable à la santé. Concepts et outils, Guide EHESP/DGS, 2014, 191 p.

    [8] Conclusions du 3e séminaire du conseil stratégique de la plateforme POPSU « La métropole et les autres », Saline royale d’Arc-et-Senans (Doubs), 30-31 août 2021

    [9] Reprenant la définition faite par l’OMS, la santé est entendue comme « un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».

    [10] Rican Stéphane, Vaillant Zoé, « Territoires et santé : enjeux sanitaires de la territorialisation et enjeux territoriaux des politiques de santé. Commentaire », Sciences sociales et santé, n° 1, vol. 27, 2009, p. 33-42, URL : https://www.cairn.info/revue-sciences-sociales-et-sante-2009-1-page-33.htm

    [11] Allorant Pierre, Dournel Sylvain, Eddazi Fouad, Guérit Franck, La métropole par la santé ? Coopérations dans les territoires de l’Orléanais, Paris, Autrement, Cahier POPSU, 2021, 93 p.

    [12] Bourdeau-Lepage Lise, Texier Pauline, Carré Hugo, « Évaluer les déterminants du bien-être sur un territoire : illustration à travers le cas d’une commune rhônalpine », Revue d’Économie Régionale & Urbaine, n° 4, 2018, p. 775-803

    [13] Fleuret Sébastien, Séchet Raymonde (dir.), La santé, les soins, les territoires. Penser le bien-être, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 236 p.

    [14] Le Saout Rémy, « Le resserrement du « double jeu » intercommunal des maires », Revue française d’administration publique, n° 154, 2015, p. 489-503

    [15] Demazière Christophe, Desjardins Xavier, Sykes Olivier (dir.), La gouvernance des métropoles et des régions urbaines. Des réformes institutionnelles aux coopérations territoriales, Paris, Plan Urbanisme Construction Architecture, 2020, 365 p.

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