[AAC] Prolongation au 23 janvier Les professionnel‧le‧s de la communication et de l’information face à l’écosystème de la donnée

Appel à communications dans le cadre du colloque scientifique du RESIPROC (Réseau
International sur la Professionnalisation des Communicateurs)
LYON les 16 &17 mai 2023

Responsables scientifiques du colloque : Alexandre Coutant, UQAM, LabCMO & LabFluens ;
Valérie Larroche, ENSSIB, Elico
Les technologies numériques se répandent de manière toujours plus intriquées dans tous nos contextes d’expérience (Couldry, 2015 ; George, 2019a, 2019b ; Rieffel, 2014), et le domaine du travail est particulièrement illustratif de cette numérisation du monde (Ferreira et al., 2018 ; Flichy, 2018 ; Menger et Paye, 2017 ; Theviot et Treille, 2019). L’une des conséquences les plus prégnantes de ce processus consiste en la centralité que prennent les “données” dans nos manières d’envisager ces contextes et les pratiques qui s’y développent (Couldry, 2015, 2018 ; Larroche et al., 2021 ; Rey, 2017 ; Supiot, 2015), au point où l’on parle de mise en données de la société, ou datafication, pour qualifier ce mouvement de fond observable dans les sociétés (Dijck, 2014 ; Flensburg et Lomborg, 2021 ; Mayer-Schönberger et Cukier, 2013). L’une des conséquences les plus frappantes dans les mondes du travail tient à la dissémination d’enjeux et de pratiques liés aux données largement audelà des secteurs historiquement préoccupés de leur exploitation, qu’il s’agisse des services informatiques, commerciaux ou marketing. Pour autant, évoquer une mise en données de la société, une culture de la donnée, une « professionnalisation de la donnée » demeurent équivoques. Le terme même de donnée est fortement discuté en termes de conceptualisation comme de valeur heuristique
(Boyd et Crawford, 2012 ; Cardon, 2015 ; Denis et Goëta, 2016 ; Gitelman, 2013 ; Latour, 2012).
Données primaires, secondaires, brutes, nettoyées, interopérables, privées, publique, ouvertes, etc.
donnent une idée de la variété de ces emplois et des imaginaires qui leur sont associés. Dans le cadre
des professions de l’information et de la communication, cela peut renvoyer tout autant à la mise en
place de stratégies de présence « guidées par les données » (data-driven) qu’aux connaissances pour
les organisations qui résideraient dans les vastes jeux de données rendus accessibles en ligne pour
peu qu’elles sachent s’en saisir. Cela passe aussi par les enjeux internes d’exploitation des masses de
données découlant des activités des différents services et accumulés sur leurs serveurs. La
mobilisation d’une forte rhétorique d’accompagnement focalisée sur les trésors de « la donnée »
masque aussi la précision conceptuelle permise par les recherches en sciences de l’information et de
la communication, l’expression pouvant tout autant référer à des traces numériques qu’à des
informations, des preuves, des signaux, des indices, etc.

Les professions de l’information et de la communication n’échappent pas à ce phénomène qui
bouleverse tout autant les pratiques, les perceptions et les relations entre les acteurs historiques et
nouveaux entrants intervenant pour structurer et former à ces métiers (Coutant et Millette, 2021 ;
Desmoulins et al., 2018 ; Grignon, 2020 ; Jammet, 2018b, 2018a ; Kondratov, 2018). C’est un défi
profond auquel se trouvent confronté·e·s praticien·ne·s et formations universitaires comme
professionnelles : placement médias ayant à intégrer les outils, indicateurs et logiques issus des
plateformes numériques ; animateurs et animatrices de communauté devant adapter leur répertoire de
connaissances et d’actions aux logiques de visibilité d’algorithmes leur demeurant en grande partie
opaques ; responsables de communication interne ayant à fabriquer l’intelligibilité des nombreux
tableaux de bord ou jeux de données « brutes » pour comprendre les dynamiques
communicationnelles de leur organisation ; production de contenus surdéterminée par les attentes,
interdits et manières de référencer imposés par les sites sur lesquels ils circuleront ; nécessité pour les
marques d’assurer la reconnaissance de leurs contenus et leur circulation contrôlée dans un
environnement informationnel où la fiabilité, la qualité et l’acceptabilité peuvent largement varier
sans accès ou compréhension approfondie des règles algorithmiques décidant de leur visibilité.
Ce constat interpelle les chercheur·e·s en information et communication à plusieurs niveaux :
comment appréhender les ruptures et continuités de cet écosystème où interviennent les
communicatrices et communicateurs et professionnel‧le‧s de l’information ? Quels enjeux de
reconnaissance, d’efficacité ou d’éthique soulève-t-il ? Le répertoire traditionnel de savoirs,
méthodes, outils et manières de faire transmis par les formations permet-il toujours la
professionnalisation ? Quelle place accorder à la compréhension de ces dispositifs organisés autour
et exploitant les « données » ? Comment définir d’ailleurs ce terme aussi convoqué que difficile à
cerner ? Ces questions complexes appellent un ensemble varié d’expertises des plus techniques aux
plus ethnographiques. Le RESIPROC s’est d’ailleurs penché régulièrement sur les enjeux de
numérisation en lien avec la professionnalisation des communicatrices et communicateurs, que ce
soit par des dossiers l’abordant de manière centrale (Coutant et Domenget, 2015), interrogeant des
conséquences spécifiques de cette numérisation (Peirot et Roginsky, 2019) ou par de nombreux
articles (Adary et Domenget, 2017 ; Domenget et Michel, 2014 ; Imhoff, 2019). Mais la centralité
prise par la question de « la donnée » invite à se pencher à nouveau sur ces enjeux. Or, c’est l’une des
richesses de l’interdisciplinarité promue par les sciences de l’information et de la communication que
d’avoir encouragé depuis leur fondation le dialogue, parfois conflictuel, entre des courants
scientifiques davantage préoccupés 1) par la compréhension et la formalisation des données et des
voies de leur organisation ou circulation avec 2) d’autres s’attachant davantage à leur actualisation
dans des logiques organisationnelles spécifiques ou à leur emploi par différentes figures d’usagers.
Ce pari du dialogue interdisciplinaire nous apparaît particulièrement fructueux aujourd’hui dans un
contexte de mise en donnée de la société qui illustre la consubstantialité de ces dimensions.
L’objectif de ce colloque est donc double. Il s’agit dans un premier temps d’interroger ce que la
centralité prise par « la donnée » soulève comme enjeux d’évolution des métiers et de formation des
communicatrices, communicateurs. Dans un second temps, il se veut l’occasion d’encourager le
dialogue entre les chercheur·e·s et professionnel·le·s de la communication, de l’information et des
médias autour de la donnée. La place des données dans les pratiques professionnelles est en effet citée
de manière récurrente comme un enjeu dans les enquêtes du European Communication Monitor1
depuis 2015 et les praticien‧ne‧s ont tout avantage à développer un recul critique sur cette mutation d
eleur environnement professionnel.
Quatre grands axes seront privilégiés :
1 https://www.communicationmonitor.eu/
• Les professionnel‧le‧s de l’influence face à « la donnée » : cet angle d’analyse encourage
des interventions abordant la manière dont les communicateurs et communicatrices et les
professionnel.le.s de l’information adaptent ou renouvellent leurs pratiques à l’aune de la
circulation des données dans l’espace public. Sans restriction à ces thèmes, quelques exemples
de questions qui pourraient être soulevées concernent : Comment exister et obtenir de
l’attention dans une organisation algorithmique de l’information qui leur échappe en grande
partie ? Quels enjeux de réputation soulève la prolifération de données issues de sources
hétéroclites et inégalement filtrées ? Quelle éthique ou déontologie implique la prolifération
de techniques manipulatoires reposant sur une exploitation des données (invisibilisation ou
mise en visibilité trafiquées, création de faux-profils, avis, contenus, etc) ? Que tirer des
multiples traces disponibles à propos de ses publics ? Comment positionner les métiers et
agences face aux incontournables nouveaux entrants que sont les plateformes numériques ?
• La place des communicatrices et communicateurs internes et des professionnel‧le‧s de
l’information face à « la donnée » : cet angle d’analyse encourage des interventions
abordant la manière dont les praticien‧ne‧s’intègrent la centralité des données dans les
organisations. Sans restriction à ces thèmes, quelques exemples de questions qui pourraient
être soulevées concernent : comment retrouver, organiser et valoriser les données
pertinentes ? Comment en tirer des informations pertinentes, les diffuser ou les archiver ?
Quelle dimension stratégique prend la maîtrise des flux informationnels et des flux de
données ? Comment faire avec la porosité accrue des frontières interne/externe ? Comment
acculturer les différents services pour accompagner les mutations des routines
professionnelles impliquées par la focalisation sur « la donnée » ?
• Former le communicateur, la communicatrice et le professionnel‧le de l’information
comme médiateurs de « la donnée » : cet angle d’analyse encourage des interventions
présentant des initiatives pédagogiques ou programmes de formation pour intégrer « la
donnée » aux savoirs et compétences transmis par les études en information et
communication. Sans restriction à ces thèmes, quelques exemples de questions qui pourraient
être soulevées concernent : comment former à une culture professionnelle de la donnée ? Quel
vocabulaire employer ? Quelle place accorder à la sémantique professionnelle de désignation
– largement anglosaxonne – des activités, des compétences ou des productions : du datamining
au Big data; de la valorisation graphique des données aux métiers de datavisualisationdataviz, design computationnel, data-storyteller ou datascientist, chief data officer, etc ?
Quelle compréhension des imaginaires de la donnée transmettre ? Quelle métrologie
développer ? Comment clarifier une éthique ou une déontologie de l’accumulation et de
l’exploitation de traces numériques ? Quelle place pour les approches critiques, notamment
de l’obsession de la donnée face à la culture professionnelle de la communication ? En quoi
les savoirs, méthodes et techniques traditionnels en communication voient leur pertinence
confirmée, discutée ou contredite ? Quelles formations à la Data visualisation, à la mise en
récit des données?
• Évolutions et permanences des métiers et des compétences de l’information et de la
communication face à « la donnée » : cet angle d’analyse encourage des interventions
décrivant l’évolution des métiers et des types d’organisation accueillant les professionnel‧le‧s
de l’information et de la communication ainsi que des interventions soulevant les enjeux de
structuration du champ professionnel. Sans restriction à ces thèmes, quelques exemples de
questions qui pourraient être soulevées concernent : comment « la donnée » vient-elle
travailler la lutte inachevée pour la reconnaissance de ces métiers ? Quelle place prennent les
organisations spécialistes de « la donnée » dans l’accueil des praticien‧ne‧s et dans la
(re)définition des métiers ? Quelles perceptions du rôle de la profession et de sa place au sein
des organisations sont promues ? A contrario, quelles compétences, quels savoirs et quelles
méthodes infocommunicationnels sont nécessaires aux professionnel‧le‧s de la donnée ?
Quelles formes de savoirs et compétences se trouvent valorisés ou mis en concurrence ?
Quelles représentations de la communication, plus ou moins médiatrices ou instrumentales,

constituent les dispositifs organisés autour de la donnée ? Quelles représentations des publics
en découlent ?
À l’instar de la mission du RESIPROC, le présent colloque s’inscrit dans une volonté de créer des
ponts entre les milieux universitaire et professionnel de manière à offrir un regard éclairé sur la
professionnalisation des communicateurs. Tout en encourageant vivement un apport scientifique, il
admettra également des regards empiriques ou des retours d’expérience professionnelle sur les
questions de la professionnalisation et de la formation. Dans un dialogue ouvert entre les deux
milieux, nous tenterons de tracer les zones de partage et avenues d’optimisation des différents
processus menant à la professionnalisation.
Les participant‧e‧s pourront par la suite soumettre leur article pour un numéro de la revue
Communication et Professionnalisation (revue qualifiante en SIC publiée aux Presses Universitaires
de Louvain) portant sur la thématique du colloque, qui paraîtra l’année suivante. Tous les articles
soumis à la revue seront évalués selon une procédure en double aveugle.
Soumission d’une proposition d’article :
Les propositions de communication doivent être envoyées par courriel, en format éditable (.doc,
.docx, .odt…) à valerie.larroche@enssib.fr et coutant.alexandre@uqam.ca avant le 6 janvier 2023.
Elles comporteront les éléments suivants :
• Sur une première page :
• le nom des auteurs et co-auteurs avec les renseignements d’affiliation (prénom, nom, statut,
institution ou organisation) de même qu’une courte notice biographique pour chacun;
• les coordonnées des auteurs et co-auteurs (adresse institutionnelle, courriel, téléphone
professionnel);
• Sur une deuxième page :
• un titre;
• l’axe dans lequel s’insère de façon préférentielle cette proposition;
• une liste de cinq mots clés;
• un résumé d’environ 3000 caractères, espaces compris, abordant la problématique, la
méthodologie adoptée et les principaux résultats qui seront développés;
• une bibliographie indicative.
Les propositions de communication feront l’objet d’une évaluation en « double aveugle » par les
membres du comité scientifique.
La réception de chaque proposition donnera lieu à un accusé de réception par courriel.
Comité scientifique
Camille Alloing, UQAM, LabCMO, LabFluens
Dany Baillargeon, Université de Sherbrooke
Mariannig le Béchec, Université Lyon 1, Elico
Vincent Brulois, Université Sorbonne Paris Nord, Labsic
Marc D. David, Université de Sherbrooke
Orelie Desfriches-Doria, Université Paris 8, Paragraphe
Marie Despret-Lonnet, Université Lyon 2, Elico
Jean-Claude Domenget, Université de Bourgogne Franche-Comté, ELLIADD
Valentyna Dymytrova, Université Lyon 3,Elico
Geoffroy Gawin, ENSSIB, Elico
Thomas Grignon, CNAM, GRIPIC
Susan Kovacs, ENSSIB, Elico
François Lambotte, Université Catholique de Louvain, Lasco
Valérie Lépine, Univ. Paul Valéry-Montpellier 3, Lerass
Florence Millerand, UQAM, LabCMO
Josianne Millette, Université Laval, LabCMO
Julien Pierre, Université de Sherbrooke
Sandrine Roginsky, Université Catholique de Louvain, Lasco
Brigitte Simonnot, Université de Lorraine, CREM
Calendrier :
• Date limite de réception des propositions de communication :  23 janvier 2023
• Retour vers les auteurs : février 2023
• Colloque : 16-17 mai 2023
En raison des contraintes calendaires, il ne pourra pas y avoir de deuxième appel, ni de report
de la date limite.
Information :
valerie.larroche@enssib.fr et coutant.alexandre@uqam.ca
Références citées :
Adary, A. et Domenget, J.-C. (2017). Entretien : pour une intégration des datadéontologues dans les
équipes communication. Revue Communication & professionnalisation, (6), 152‑160.
https://doi.org/10.14428/rcompro.v0i6.3483

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