[Vulgarisation] Du travail avant le contrat de travail

 

 

On associe fréquemment le XIXe siècle à l’émergence du travail salarié et de la classe ouvrière. C’est une histoire qui évoque les représentations de Germinal, des révolutions industrielles ou du travail de femmes harassées dans les « sweatshops », les ateliers de la sueur… Mais derrière ces images, dans quel monde évoluait réellement ce salariat avant l’heure ?

Le documentaire Une histoire du salariat – 19e siècle – un travail sans contrat de travail questionne la réalité de la vie active à une époque où le contrat et le droit du travail n’existent pas encore. En retraçant l’apparition des droits, en analysant l’indépendance des ouvriers, il aboutit aux prémices d’un droit protecteur à la fin du XIXe siècle.

Un ouvrier « entrepreneur » ?

Au lendemain de la Révolution française et de l’abolition des corporations, le négoce fait travailler des artisans urbains, des travailleurs à domicile, des femmes de paysans, et des paysans à l’ouvrage pendant la morte saison – dans une France alors très rurale. Selon le  Code civil de 1804, c’est le « louage d’ouvrage » qui est en vigueur : l’ouvrier travaille le plus souvent comme un indépendant pour un négociant, en étant considéré comme l’« entrepreneur en la partie qu’il traite ».

Pour accomplir son travail, il peut embaucher à son tour des ouvriers et/ou des membres de sa famille pour l’aider : c’est le « marchandage », une forme d’exploitation des ouvriers par des ouvriers. C’est aussi un mode de travail que l’on retrouve dans les mines, comme le décrit Émile Zola dans Germinal. Dans le documentaire, Claude Didry montre en quoi cet aspect du « marchandage » est important dans les rapports sociaux de l’époque.

À partir de la deuxième industrialisation, la main d’œuvre féminine est massivement embauchée pour la production, ainsi que les enfants. Tout ce monde travaille à la pièce sur la base de la production effectuée. Mais exceptées quelques installations industrielles très importantes comme le Creusot, la production est très éclatée.


Un capitalisme de négociants domine alors la production. Dans celui-ci, des négociants réalisent des marchandises en faisant appel à un appareil productif relevant de différents corps de métiers. La formation professionnelle est alors bien souvent financée par des écoles privées fondées par des chambres de commerce et liées à une demande émanant des industriels.

Des « sweatshop » au travail qualifié

Dans le même temps, des « sweatshops » (surtout dans le domaine textile) se constituent, majoritairement, à partir de femmes travaillant à domicile. Questionné à ce sujet dans le documentaire, Jérôme Gautié montre comment ces « ateliers de la sueur » se développent dans tous les pays industrialisés. Les salaires à la pièce qui servent de rémunération sont extrêmement faibles et donnent lieu à des conditions de travail très dures et à un contrôle de l’immigration – ce que dénoncent de plus en plus d’organisations.

Mais l’histoire du salariat au XIX siècle ne se limite pas à ce travail dans les « sweatshops » ou au marchandage : le travail qualifié est tout aussi important dans le monde ouvrier. Les femmes sont d’ailleurs nombreuses à l’effectuer, ce que démontre Manuela Martini en le liant aux tenants et aux aboutissants des ségrégations du travail et des salaires.

La fin des années 1890 voit l’apparition des premiers salaires planchers pour la commande publique : ce sont les décrets Millerand d’août 1899 en France. La loi du 2 novembre 1892 limite quant à elle le travail des enfants et crée le corps des inspecteurs du travail. Enfin, une proposition de code du travail est faite en 1905 par Arthur Groussier, au nom du groupe des députés socialistes.

Lien vers le film https://sms.hypotheses.org/25635
 

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