[AAC] Économie sociale et solidaire et Développement durable : des approches pertinentes pour le vingt-et-unième siècle ?
RIUESS Clermont-Ferrand
Du 27 mai au 29 mai 2020
Clermont-Ferrand
Laboratoire Communication et Sociétés, Axe « Communication, innovation sociale et économie sociale et solidaire » – EA 7481 – Université Clermont Auvergne
Le but de ce vingtième colloque du RIUESS est d’interroger le concept de développement durable (DD) à l’aune des pratiques et des recherches de l’économie sociale et solidaire (ESS) et, inversement, de questionner les pratiques et les recherches en ESS à l’aune de cette notion plus politique que scientifique. Il s’agit, tout d’abord, dans ce colloque ouvert à toutes les SHS (économie, philosophie, science politique, sociologie, sciences de gestion, sciences de la communication, droit, géographie, anthropologie, etc.), de s’interroger sur le type de société pensé par les acteur·rices et les chercheur·ses de l’ESS et du DD : Œuvre-t-on dans le sens d’une adaptation du capitalisme aux contraintes écologiques ? Participe-t-on à la transformation d’un capitalisme extractif en un capitalisme vert et éthique ou souhaite-t-on la transition vers une société post-capitaliste ? Il s’agit, ensuite, dans un contexte international marqué par la montée des populismes, de s’interroger sur la dimension démocratique des changements à l’œuvre dans une globalisation destructrice de biodiversité et productrice d’inégalités qui ne font que croître. Il s’agit enfin, dans un monde en pleine mutation, où les médias et les réseaux sociaux numériques conditionnent notre accès au monde, de contribuer à une saine clarification du débat en s’efforçant d’expliciter les notions récentes et de caractériser les pratiques émergentes.
Les propositions de communications sont rédigées en français et peuvent prendre différentes formes (modélisation théorique, étude de cas, réflexion critique, témoignage d’acteur·rices, etc.). Elles doivent prioritairement s’inscrire dans un des cinq axes suivants, mais des communications hors axe peuvent être acceptées si elles s’inscrivent dans la thématique générale du colloque (les liens entre ESS et développement durable)
Axe I : Clarification et critique conceptuelle.
Comme le terme « Economie Sociale et Solidaire », le terme de « Développement Durable » réclame une clarification conceptuelle. L’ESS est-elle porteuse de modèles d’organisation et de gestion intégrant les logiques et dispositifs du DD ? Ou doit-on distinguer une ESS adaptée aux représentations du DD d’une ESS politique plus en phase avec les conceptions théoriques décroissantes ? Il s’agirait notamment ici de replacer les débats dans le contexte de l’émergence de ces deux notions et de la manière dont elles ont trouvé à s’articuler, mais aussi de comprendre les glissements sémantiques qui se sont opérés. Plus récemment, les deux approches ont connu de nombreuses variations. En témoigne la multiplication des théories, des projets et des mots qui les désignent. A l’heure où certains parlent d’effondrement, d’anthropocène ou de transition, à l’époque où un capitalisme numérique semble se différencier d’un capitalisme extractif, au moment où de nouvelles formes d’économie (collaborative, circulaire, etc.) et de nouvelles formes de résistance voient le jour (ZAD, décroissance, zone de gratuité, etc.), il semble en effet temps de redéfinir, de manière critique, les différents termes souvent employés comme synonymes dans l’espace médiatique. Il convient, également, de proposer des modélisations permettant de visualiser les ressemblances et les différences entre ces différentes notions. Tel est, en tout cas, l’objectif de cet axe qui s’efforcera également de mettre au centre de sa réflexion la question démocratique : peut-on avoir un développement durable sans une démocratie renouvelée et l’ESS peut-elle représenter ce nouveau projet démocratique ? L’ESS dans des zones non démocratiques est-elle encore de l’ESS ? Comment favoriser une participation démocratique des citoyen·nes aux enjeux actuels du DD et de l’ESS ?
Axe II : ESS et DD : Tensions et dissonances entre discours et pratiques
Il est souvent plus facile d’exprimer ce que n’est pas le développement durable (DD) que de le définir positivement. Son ambition originelle se focalise sur la conciliation problématique entre des intérêts économiques d’un régime plus responsable et vertueux et des impératifs de préservation des ressources. Les dimensions sociétales et démocratiques souffrent d’une insuffisante lisibilité et reconnaissance. Cette faiblesse apparaît d’autant plus préoccupante que le succès du DD doit pouvoir reposer sur une dynamique de solidarité, sur une prise de conscience des interdépendances et sur la participation de toutes et tous.
Ce défi est aussi celui que partagent les acteur·rices de l’économie sociale et solidaire (ESS) directement interpellés. Comment ces acteur·rices de l’ESS s’emparent du DD dans leur manière d’inventer des réponses concrètes par des projets de développement social et solidaire durable ? Comment les actions en faveur du DD des territoires ouvrent la voie aux initiatives émergentes de l’ESS ? S’agit-il d’expériences sociétales là aux d’autres y voient des opportunités expérimentales au service d’un capitalisme moral ou éthique? Comment l’ESS et le DD s’emparent-ils des questions de genre et d’égalité femme-homme? L’ESS peut-elle contribuer à la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD) ? Les ODD conduisent-ils à une normalisation et une banalisation des actions des organisations de l’ESS ? On l’aura compris, l’accent sera porté sur les convergences entre ESS et DD mais aussi sur les angles morts et leurs divergences dans les objectifs et les stratégies des un·es et des autres. Cet axe offre l’occasion de croiser le regard sur des travaux empiriques centrés sur les enjeux et les défis de la coopération entre les acteur·rices du DD et de l’ESS. La dimension internationale sera mise en valeur, notamment pour discuter de la place de la culture mais aussi de la décolonisation dans la coopération Nord/Sud et de l’émergence d’une citoyenneté.
Axe III : Territoires, communs et mondialisation de la solidarité.
L’ESS s’affirme souvent comme locale, territorialisée ; le développement durable souligne, lui, sa dimension globale. Comment articuler les deux ? Comment organiser des solidarités locales, voulues choisies, à l’heure où le changement climatique nous rappelle notre interdépendance de fait ? Comment, d’un côté, éviter les égoïsmes territoriaux, souvent nationaux d’ailleurs, promus par un populisme d’extrême droite et, de l’autre, construire des solidarités internationales qui ne soient plus basées sur un esprit et une culture de la bienfaisance, hérités d’un passé colonial qu’il convient de dépasser ? Comment rendre les territoires résilients ? Quels sont les espaces publics qui, à l’image des espaces publics de proximité chers à l’ESS, permettent aux habitant·es des différents territoires du globe de décider ensemble de la bonne échelle d’action ? De quel territoire parle-t-on ? Un territoire réceptacle de stratégies allochtones, extraverties et de capture d’activités ou de patrimoine s’affichant comme participant au DD (greenwashing) ou comme un territoire révélant des ressources au travers d’initiatives endogènes reposant sur les principes d’autonomisation territoriale, d’auto-organisation, de gratuité et de réciprocité, un commun ? Les communs, lorsqu’ils sont attachés à l’enjeu de la démocratie tout autant qu’à celui de l’écologie, peuvent-ils constituer un véhicule permettant de relier les dimensions locales et internationales, tout autant que de susciter des convergences entre différents formes et niveaux de solidarité ? Comment, dans ce contexte, s’articulent les traditions différentes, de l’ESS, du DD, de la solidarité internationale et du commerce équitable ? Comment aussi traiter, concrètement, les questions migratoires ? Sur ce dernier point, les études sur les migrations promeuvent aujourd’hui, pour en penser les liens financiers et humains, le concept de « translocal ». Elles substituent ce concept à celui de transnational afin d’indiquer que les solidarités associent des communautés locales ancrées dans des espaces différents. Ce faisant, elles ouvrent la perspective d’un translocalisme des territoires durables et solidaires qu’il convient d’explorer.
Axe IV : Pratiques émergentes et DD.
Les monnaies sociales, la consommation responsable, l’économie collaborative, l’économie circulaire, la finance participative, l’entrepreneuriat social, etc. toutes ces pratiques revendiquent une rupture avec le capitalisme actuel. Cependant, malgré la démultiplication d’initiatives citoyennes émergentes proposant des alternatives à l’économie capitaliste, la prégnance dans les imaginaires et dans les pratiques quotidiennes du sophisme marchand, empêche la valorisation et la viabilité de ces initiatives en les cantonnant dans les marges ou en les invisibilisant. Or, le potentiel transformateur de certaines d’entre elles est important à condition que l’on sache s’en saisir. Les pouvoirs publics peuvent avoir un rôle de facilitation pour permettre l’émergence et le développement de ces alternatives ou, au contraire, ils peuvent les entraver. Par ailleurs, si certaines de ces pratiques émergentes aspirent à proposer des modèles économiques alternatifs au capitalisme, d’autres en détournent les aspirations en créant des nouvelles niches de marché en phase avec les nouvelles demandes des consommateur·rices de plus en plus sensibles aux questions liées au développement durable. Les questions qui peuvent donc être abordées dans cet axe sont multiples : Qu’en est-il dans les faits de ces pratiques émergentes ? Quelles visions du DD portent-elles ? Quel renouvellement des pratiques démocratiques génèrent-elles ? Peut-on encore parler de développement durable, quand 98% de l’économie est une économie spéculative ? Quels rôles ont les pouvoirs publics pour faciliter ou entraver ces initiatives citoyennes ? Quels sont les risques d’une récupération marchande de ces pratiques ?
Axe V : Recherches-action en ESS et DD : enjeux épistémologiques, méthodologiques, éthiques et politiques
De la recherche-action (RA) définie par Kurt Lewin dans les années 1940 à la recherche-action-formation initiée par Desroche et développée par Draperi, en allant jusqu’aux recherches partenariales québécoises, les pratiques diffèrent grandement d’une discipline à une autre, d’un objet à un autre. Mais au-delà de ces différences, les acteurs et actrices qui s’inscrivent dans cette tradition de recherche poursuivent un double objectif de production de connaissances et de changement de la réalité par l’action ; ils et elles partagent le désir de transformer la société. En France, notre histoire institutionnelle et sociétale ne favorise pas ce type de recherches, alors même qu’elles semblent prometteuses pour accompagner les transitions en cours, qu’elles soient sociales, économiques ou environnementales. Cet axe propose d’approfondir les réflexions épistémologiques sur la ou les RA menées dans l’ESS ; d’interroger les conditions à remplir pour produire une connaissance valide et peser sur les processus de changement social à l’œuvre. Il propose également de questionner la posture des chercheur·ses issu·es de différentes disciplines et leur responsabilité sociale et sociétale : quels points de vigilance doivent avoir ces chercheur·ses en tête ? quels rôles endosser dans la coproduction de connaissances ? Cet axe propose, par ailleurs, de faire mieux connaître et reconnaître les RA dans le champ de l’ESS et du DD : quelles pratiques de collaboration entre chercheur·ses et acteur·rices se développent-elles ? (ARUC au Québec, PICRI en France) ? Pour quels résultats ?
Calendrier
La date limite de réception des communications est fixée au 15 janvier 2020.
Ces propositions, de 1 200 mots maximum, doivent préciser le sujet, la méthodologie et l’apport, et, être envoyées à riuess2020@tutanota.com en précisant l’axe auquel elles sont destinées. Chaque proposition sera évaluée en double aveugle par le comité scientifique. Les propositions devront posséder deux éléments distincts :
1-Une fiche d’identification précisant le nom du ou des auteur·rices, ses qualités, le titre de l’intervention et un acronyme de cinq lettres.
2-La proposition proprement dite de 1 200 mots maximum identifiée par son seul acronyme précisant l’axe et comprenant une bibliographie indicative d’au moins cinq références.
Le comité scientifique fera parvenir sa réponse, acceptation ou refus, aux auteur·rices avant le 15 mars 2020. Les textes définitifs devront être envoyés au plus tard le 25 avril 2020.
Membres du comité scientifique (pressentis)
Bouchard Marie (Uqam, Québec), Bucolo Elisabetta (Cnam), Combes-Joret Monique (Université de Reims), Dacheux Eric (UCA), Defalvard Hervé (Université Marne la Vallée), Draperi Jean-François (Cnam), Eynaud Philippe (IAE de Paris), Bruno Frère (Université de Liège), Gianfaldoni Patrick (Université d’Avignon), Hiez David (Université du Luxembourg), Laville Jean-Louis (Cnam), Lhuillier Vincent (Université de Lorraine), Manoury Lucile (Université d’Avignon), Richez-Battesti Nadine (Université d’Aix-Marseille), Robin Yannig (Université de Bretagne Occidentale), Stoessel-Ritz Josiane (Université de Mulhouse), Pierre André Tremblay (Université du Québec à Chicoutimi).
Membres du comité d’organisation
Agbessi Eric (communication, UCA), Batisse Cécile (économiste, UCA), Bussière Alain (commerce équitable, UCA), Collet Raymond (Clermont Métropole), Corneloup Jean (culture récréative, UCA), Couturier Pierre (sociologue, UCA), Dacheux Eric (communication, UCA), Diemer Arnaud (centre Erasme, UCA), Duracka Nicolas (Centre innovation sociale), Garadin Laure (CRESS), Garlot Florine (doctorante UCA), Zumbo-Lebrument Cédrine (Gestion, ESC), Mulnet Didier (éducation au Développement durable, UCA), Tichit Ariane (économiste, UCA), Volat Geoffrey (doctorant UCA), Zouari Khaled (communication, UCA).
Pour tout renseignement :
Le responsable scientifique : riuess2020@tutanota.com
La secrétaire du laboratoire : Nathalie Policard : 04 73 40 85 19